Posté le 18 octobre 2021
Innovation et numérique responsable
L’innovation est souvent synonyme de progrès. Il peut être sans limite. Et il est à considérer comme en partie responsable de la crise écologique que nous vivons. Dans cet article, découvrez comment les principes pour un numérique plus responsable nous aident à innover, tout en restant sobre dans nos usages de la technologie.
5 minutes de lecture.
De l’ébriété numérique...
Une ressource critique
Une étude allemande a montré, dans des conditions expérimentales, qu’il est plus facile pour une majorité de personnes de se priver de nourriture et de relations sexuelles que d’une connexion internet et de réseaux sociaux (Hofmann, Voh & Baumeister - 2012). Le numérique est devenu, en l’espace d’une à deux générations, une ressource critique. Critique pour notre vie au quotidien, critique pour les activités des entreprises, critique pour les services publics.
Objet emblématique de cette orgie : le smartphone, que nous consultons une fois toutes les 6 minutes, soit 221 fois par jour (Termack - 2014). Nous en faisons tous l’expérience dans nos vies, les temps morts n'existent plus ! Attente dans les transports, marche dans la rue, réunion qui s’éternise….sont autant de prétexte à un coup d’œil sur nos écrans. Notre monde réel et notre monde virtuel s’entremêlent, captant de plus en plus de notre temps de cerveau disponible (pour reprendre un thème développé par Bronner dans Apocalypse Cognitive - 2021).
Il est paradoxal que ces impacts sur nos esprits, bien qu'immatériels, nous soient plus perceptibles que les conséquences, matérielles celles-ci, qu'ont nos usages numériques sur l'environnement. En France, selon les indicateurs environnementaux, le numérique représente déjà de 2% à 8% de l’empreinte, en constante augmentation. Le secteur du numérique dans le monde, c’est 36 milliards d’équipements (ordinateurs, téléphones portables, câbles, centres de données,...), dont la masse serait celle de 180 millions de voitures (Bordage 2021) ! Tous ces équipements sont très dépendants d’énergie et de matières premières pour leur fabrication. Par ailleurs, les potentialités du recyclage sont très réduites. Au rythme de croissance actuel du secteur, et au regard des l’état des réserves connues, cela fait peser, en l’espace d’une génération, des menaces de pénuries potentiellement catastrophiques pour l’humanité.
À la sobriété numérique…
Des services numériques utiles et soutenables
Le numérique est un outil précieux ! Il est indispensable pour soutenir la grande accélération de la transition visant un ajustement de nos sociétés aux limites planétaires. Il est nécessaire pour faire face aux défis sociaux à venir. Les concepts de sobriété numérique ou de numérique responsable répondent à ces enjeux.
La sobriété numérique vise un usage juste de la technologie, proportionné dans ses moyens pour répondre à un besoin, lui-même bien spécifié. Selon The Shift Project : “la sobriété numérique, c’est passer d’un numérique instinctif voire compulsif à un numérique piloté, qui sait choisir ses directions : au vu des opportunités, mais également au vu des risques.” Pour le collectif GreenIT, la sobriété numérique est une démarche qui consiste à économiser cette ressource critique non renouvelable, en réduisant notre taux d'équipement et en allongeant leur durée de vie, via le réemploi, la réparation, et l'écoconception des services numériques.
Le numérique responsable s’inscrit dans la définition du développement durable, tel que développée en 1987 par le rapport Mme Brundtland devant la Commission européenne : “répondre aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs.” Ainsi le numérique responsable vise trois engagements : préservation de l’environnement (Planet), équité sociale (People), prospérité économique (Profit).

Un Numérique plus responsable pour Mobilite.eco
Quelques exemples d'application
Mobilite.eco est signataire de la charte de l'Institut du Numérique Responsable. Celui-ci en définit les enjeux :
“la réduction de l’empreinte (économique, sociale et environnementale) du numérique, la capacité du numérique à réduire l’empreinte (économique, sociale et environnementale) de l’humanité, et la création de valeur durable / innovation responsable via le numérique pour réussir l’e-inclusion de tous.”
Comment nous y répondons au sein de Mobilite.eco ? Et comment mettons-nous en oeuvre la sobriété numérique ? En voici quelques exemples.
Le numérique pour promouvoir la mobilité durable et contribuer à réduire l'empreinte des transports.
En premier lieu, il est important de souligner que nous sommes loin d’être parfaits et ne prétendons pas l’être ! Nous sommes tout à fait conscients que notre plateforme technologique a, en soi, un impact. Mais nous estimons qu’elle apporte une réelle solution pour contribuer à l’usage des mobilités durables (pourquoi cette mission ? Découvrez-le en lisant notre manifeste).
Mobilite.eco propose aux entreprises une solution pour faciliter la mise en œuvre du Forfait Mobilités Durables. Lancé en 2019 avec la Loi d’Orientation des Mobilités, il prévoit pour l’employeur une exonération fiscale et sociale, à hauteur de 500€, pour toute incitation à l’usage de la mobilité durable (vélo, covoiturage,...) sur les trajets domicile-travail. Sa mise en œuvre est facultative. Selon le Baromètre Forfait Mobilités Durables de l’Ademe, seul 20 % des entreprises sondées l’avait déployé dix mois après le premier décret d’application. Un des principaux freins identifiés au niveau des directions des entreprises est l’absence de preuve de la réalité, au quotidien, de l’usage de la mobilité durable par les collaborateurs. C’est précisément ce à quoi répond Mobilite.eco ! Nous automatisons la gestion du Forfait Mobilités Durables. Et l’application mobile permet de détecter et de certifier les modes de transports utilisés lors des trajets des salariés entre leur domicile et leur lieu de travail. La preuve de chaque trajet, et de la réduction éventuelle de CO2e associée en cas d’un report modal favorable, est enregistrée dans une blockchain (conçue elle aussi de façon à réduire son impact) devenant ainsi infalsifiable.
Réduire l'impact de nos dispositifs par l'éco-conception
Nous souhaitons limiter les impacts environnementaux de notre solution. Nous nous sommes ainsi engagés depuis quelques mois dans une démarche d’éco-conception. Éco-concevoir notre site web institutionnel et ce blog a été une première étape, validant la démarche et notre capacité à le faire ! Nous racontons en détail le projet dans l’article “Une démarche d’éco-conception numérique”.
Limiter l'impact de la blockchain
La création de preuves de l’usage d’une mobilité durable ou d’émissions de CO2e évité se fait par une blockchain. Il s’agit d’une “Blockchain Permissionnée” ou “Blockchain Privée”. Deux points permettent d’en limiter l’impact :
- Le premier a trait avec la manière dont les transactions faîtes par l’utilisateur (dans notre cas, par exemple, l’usage du vélo sur un trajet à la place de la voiture) sont sélectionnées et enregistrées dans les blocs. C’est le "consensus". Il en existe de plusieurs types. La “Prouf-of-Work” (preuve de travail) est utilisée par le Bitcoin. La sélection se fait via la résolution de calculs complexes. La “Prouf-of-Stake” (preuve d’enjeu) est utilisée par Cardona : la sélection du mineur est faite aléatoirement, tout en étant pondérée par la quantité de cryptomonnaie à disposition de ce mineur. Le dernier type de consensus est la “Practical Byzantine Fault Tolerance” : chaque mineur a reçu une permission pour participer à la blockchain et chaque transaction est validée par plusieurs mineurs autorisés. C’est ce processus qui est utilisé par Mobilite.eco car il nécessite moins de mineurs et moins de calculs pour certifier une transaction.
- Le deuxième point est lié au stockage de données : sur les blockchain publiques, tous les nœuds de la blockchain stockent les données de la chaîne, ce qui génère un impact important. Sur les blockchains privées comme la nôtre, il n’y a que les participants autorisés qui stockent la chaîne, ce qui limite donc le volume de données et l’impact afférent.
Ainsi, même si cela semble paradoxal, il est tout à fait possible d'associer blockchain et développement durable !
Transparence et protection des données !
Nous sommes très attachés au principe de transparence !
Ainsi la question de la protection de la vie privée des collaborateurs au regard de leur employeur est un sujet très sensible ! Il ne paraît en effet pas envisageable qu’une entreprise puisse suivre à la trace ses salariés quand ils sortent de chez eux, avant d’arriver à leur travail ou en repartant le soir ! C’est là que Mobilite.eco joue pleinement son rôle de tiers certificateur ! Et c’est là que nous le faisons avec sobriété ! Nous le racontons en détail dans notre article "Les coulisses d’une application pour promouvoir la mobilité durable".
Côté collaborateur, nous n’activons les services de géolocalisation et d’accélérométrie du téléphone, indispensables pour déterminer la mobilité du collaborateur, qu’à des points restreints et bien définis autour du domicile et du lieu de travail. Ces données sont traitées pour en tirer la mobilité utilisée, mais elles ne sont pas enregistrées telles qu’elles. Seule la mobilité utilisée l’est. Et uniquement dans le téléphone du collaborateur tant que celui-ci n'a pas donné son accord pour transmettre cette information via une action manuelle (elles ne sont pas automatiquement envoyées à l’employeur). Une preuve de trajets ou de CO2e évité est générée ainsi une fois par mois (et non pas tous les jours) pour qu’il puisse percevoir le forfait mobilités durables. L’employeur n’a ainsi pas accès aux détails de ce que fait le collaborateur avant de venir au travail ou en repartant de son bureau le soir.
Encore un long chemin à parcourir !
Nous sommes perfectibles !
Nous avons identifié bien des pistes de travail sur lesquelles nous souhaitons nous améliorer dans les semaines et mois qui viennent ! Il s'agit par exemple d'affiner les facteurs d'émission liés à l'utilisation de notre application afin de les intégrer dans notre algorithme de calcul, ou encore prendre en compte les étapes de fabrication en même temps que l'usage des moyens de transports. Grâce à la sobriété numérique, nous avons le sentiment de réinventer chaque jour notre métier ! C’est passionnant à vivre, nous sommes heureux de vous le faire partager, et espérons que cela peut peut-être vous inspirer.